Point de vue

Cap sur l’Unité maghrébine : l’espoir reste permis

Par : El Mostafa NAZIH

Très peu de gens savent que cette année 2020, qui constitue l’entame d’une autre décennie que les peuples maghrébins accueillent forcément avec un mélange de scepticisme et d’espoir, coïncide avec le 31ème anniversaire de l’Union du Maghreb Arabe (UMA), du fait qu’il y a belle lurette que certains ont mis cet anniversaire au placard, et que les médias s’en font l’écho de moins en moins.

Que des intellectuels marocains, dont des écrivains, universitaires, diplomates et journalistes, organisent, par les temps qui courent, une rencontre de réflexion sur les « mécanismes d’activation » de cette Union, relève certainement de l’audace. Ce qui est sûr, c’est qu’ils sont dans leur rôle, les intellectuels étant bien évidemment des précurseurs. Faut-il reconnaître aussi qu’outre la fibre maghrébine qui les animent, c’est l’élan de solidarité et de fraternité des peuples de la région du Maghreb enraciné et qui s’exprime chaque fois que l’occasion se présente, et le désir de ces peuples de franchir les frontières auxquelles sentimentalement ils n’y croient pas, qui rappellent ce devoir d’être précurseur.

En effet, c’est sur le thème des « Mécanismes d’activation de l’Union du Maghreb arabe à la lumière des défis régionaux actuels », que, samedi à Rabat, une pléiade de professeurs et experts, lors de cette rencontre de réflexion, organisée par le Conseil marocain des Affaires étrangères (CMAE) et le journal électronique « Labib.ma » en partenariat avec le Laboratoire d’Etudes et de Recherches juridiques et politiques de la Faculté de Droit, a remué cette question dans tous les sens et, par la force des choses, aussi les problématiques qui s’invitent chaque fois que sont évoquées les relations entre pays de cet ensemble régional.

Dans la tribune de la salle de Conférences de la Faculté, il y avait, outre les professeurs Ismail Alaoui et Fouad Mohamed Amor qui ont dirigé chacun une séance du programme, Mohamed Redouane, chercheur en relations internationales et directeur de « Labib.ma », Ahmed Noureddine, chercheur en relations internationales, Taieb Dekkar, journaliste et écrivain, Elhassane Zahid, ambassadeur, spécialiste de la diplomatie multilatérale, Mohamed Senoussi, professeur de géo-économie et d’intelligence stratégique et président du CMAE, Mohamed Tajeddine Elhoussaini, professeur des relations internationales, Farida Jaidi, ambassadrice, spécialisée en coaching diplomatique, Taieb Chaoudri, ambassadeur, président du Club diplomatique marocain, et Abdenebi Sabri, professeur des relations internationales.

Certains de ces intervenants ont ainsi invité l’assistance à une visite de l’histoire (avec les succès et les déboires de parcours), d’autres ont passé en revue certains conflits et leurs origines, d’autres encore ont brossé un tableau des défis régionaux actuels et d’autres se sont attardés sur la démocratie dans l’espace maghrébin (en s’attachant par moments à l’orthodoxie), alors que nombre d’intervenants ont insisté sur l’importance de militer pour la complémentarité économique et insisté aussi sur ce qui est commun aux peuples maghrébins et Dieu merci, ce qui unit est beaucoup plus important que ce qui divise.

Lors de la discussion autour de la Démocratie, la CEDEAO a été donnée en exemple. La Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest est, en effet, un espace économique, mais dans lequel le respect du recours aux urnes et de l’intégrité territoriale des Etats membres est de mise. C’est une discussion qui reste ouverte dans l’esprit démocratique bien que nombre de participants soutiennent que l’instauration du processus démocratique est la clef de voûte de l’UMA. 

L’accent a été également mis sur la nécessité pour les politiques de coopérer quant aux défis sécuritaires et du terrorisme, migratoires et environnementaux notamment.

En plus de la course aux armements, qui impacte l’effort de développement et qui a été soulignée, la panne de l’UMA continue d’impacter le PIB (Produit Intérieur Brut) par la perte annuelle de 2,5 points dans chacun des pays de ce groupement régional.   

Les débats étaient passionnants en général, et s’attelaient, parallèlement, à apaiser certaines tensions politiques qui entravent la complémentarité économique dans l’espace maghrébin, à cause justement de ces problématiques qui refont surface. D’où le mérite de la rencontre d’avoir insisté sur la nécessité de faire, en toute honnêteté intellectuelle, le Diagnostic des relations maghrébines aussi bien sur le plan bilatéral que multilatéral, ainsi qu’en tenant compte du facteur étranger qu’on ne peut naturellement pas occulter.

La rencontre a, à la fin d’une journée d’interventions et de débats, riche en informations et enseignements, tranché au moins sur le fait que l’union des peuples du Maghreb est inéluctable et que, tôt ou tard, elle est réalisable. C’est un projet sociétal-régional et populaire.

À cette fin, a-t-on particulièrement martelé, la société civile au Maroc, en Algérie, en Mauritanie, en Tunisie et en Libye se doit de jouer son rôle plus que jamais, sans se décourager par le manque de moyens et l’inertie de certains politiques, la fibre de l’unité maghrébine étant d’abord celle des peuples.

La suggestion d’associer les intellectuels des autres pays maghrébins à cette réflexion de longue haleine, lors de prochaines rencontres, a été notée dans l’espoir de concrétiser l’idéal unitaire maghrébin auquel aspirent les peuples. Plaident en cela, le socle solide de liens historiques, culturels, religieux, humains, linguistiques et de géographie qu’ils partagent.

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